Une, deux, trois (fin)

Elles sont trois.
Elles sont intarissables et inséparables.
L’une commence, la deuxième enchaîne, et la troisième termine les phrases de ses sœurs !
Ou alors, elles parlent d’une seule voix !
Voici donc la suite de cette conversation chorale avec Claire, Véronique et Sophie.


Transcription
T: les triplées / V: Véronique / C: Claire / S: Sophie / A: Anne

A : Bon, vous dites (1) vous vous ressemblez, tout ça. Mais quand même, est-ce que vous diriez, je sais pas, il y a des personnalités un petit peu différentes…
T : Oh oui, oui.
V : On a toujours été différentes.
S : On se ressemble mais on se complète aussi.
C : Véro, elle est plus…
S : Véro elle est un peu plus… leader.
C : Indépendante.
S : C’est un boute-en-train (2).
A : C’est vrai ?
C : Oui. Sophie, c’est plus la maman, moi je dirais. Toujours là pour…
V : Elle cadre (3), elle…
S : Voilà.
C : Et puis moi, beh…
V : Claire, c’est : « Je suis calme, je suis neutre, je… » 
C : Ça a toujours été de cet ordre-là (4), en fait. Même de petite jusqu’à maintenant, voilà, j’ai toujours été au milieu, un peu à…
S : C’est-à-dire tu es née en deuxième.
V : En deuxième.
A : D’ailleurs, ça, j’avais une question là-dessus.
C : Et j’ai marché en second, et j’ai parlé en second, j’ai tout fait en second. Donc la place de première, je l’ai jamais eue.
A : D’accord. Et alors, autre question. Vos parents, bon, bah ils savaient… Donc vous m’avez dit : ils savaient qu’il y avait…
T : Des jumeaux. Deux garçons.
C : Après, des triplés.
V : Voilà, après, deux garçons et une fille.
A : Ils l’ont su quand qu’il y avait des triplés ?
T : Troisième mois. Troisième mois.
A : Ah quand même !
C : Troisième mois.
A : Donc ils avaient eu le temps de se préparer.
C : Voilà.
A : De chercher des prénoms.
C : Voilà. Mais ils avaient anticipé.
V : Ils avaient prévu des prénoms de filles aussi.
C : Trois garçons, trois prénoms de garçon…
A : Et alors, comment on fait pour choisir, pour dire : là, c’est Claire, là, c’est Sophie ?
V : En fait, donc notre maman, elle avait dit, dès le départ, que si elle avait une fille, elle voulait qu’elle s’appelle Véronique. Donc du coup, vu que j’étais la première sortie, elle s’est dit : Bon bah j’ai ma fille. Maintenant, mes deux garçons arrivent. Donc Véronique. Donc j’ai eu Véronique. J’ai eu les prénoms de mes grand-mères.
S : Sur la liste des filles, c’était le premier qu’elle voulait : Véronique.
C : Après en deuxième, elle avait mis Claire. Donc comme je suis née en second, elle m’a donné Claire. Et après, ça a été Sophie.
A : D’accord !
S : Elle a fait par ordre.
C : Et c’est… c’est Véro… Véronique qui a eu aussi les prénoms de nos grand-mères, parce que comme elle pensait après avoir deux garçons, elle s’est dit : Je vais donner les noms des grand-mères à la première fille. Donc c’est Véro…
V : C’est moi.
C : … qui a les deux noms des grand-mères.
A : D’acord. C’est quoi, les prénoms des grand-mères ?
V : Alors, c’est grec. Donc il y a Aphrodite, c’est la déesse de l’amour et de la beauté. Et il y a Irène.
A : Pourquoi ? Il y a des origines grecques alors ?
S : Oui, notre maman.
V : Oui, du côté de notre maman, on est grecques, et du côté de notre papa, on est italiennes et espagnoles.
C : Donc Méditerranée, voilà.
S : Méditerranéennes.
A : J’aurais juste quand même une… une ou deux petites questions, là, par rapport à vos… à vos parents, quoi, à votre maman, tout ça. Comment ils ont réagi quand ils ont su ça ?
C : Notre papa etait super trop content (5) ! Parce que il voulait trois filles.
V : Parce qu’il a cinq frères.
C : Parce qu’ il a cinq frères.
A : Ah oui ?
C : Donc il a dit : j’en ai marre (6) des garçons ! Voilà. Je veux des filles, voir ce que c’est.
A : Et j’en veux trois !
V : Il s’est dit : j’en veux trois.
C : Bon, il avait pas prévu trois d’un coup (7). Mais au final…
S : Il était trop content.
C : … il était super heureux. Notre maman, elle était un peu plus angoissée. Mais…
A : Oui, c’est ça, quand même ! D’un point de vue matériel, enfin, c’est ça, je sais pas, moi je me dis les premiers… les premiers mois…
V : Tous les biberons qu’il y avait, toutes les couches…
C : Vingt-quatre biberons dans la journée. Vu qu’en plus, on était prématurées donc… Et notre maman pouvait avoir de l’aide, enfin des aides extérieures mais elle a pas voulu. Donc il y avait notre papa, notre maman, bon, nos grands-parents qui y étaient aussi un petit peu. Mais hormis ça (8), elle n’a pas voulu.
A : Ça a dû être la révolution, hein !
T : Ah oui !
S : L’usine, une usine ! (9)
V : Et quand maman préparait les biberons, papa en berçait une… enfin il la tenait dans un bras (10). L’autre dans le deuxième bras et l’autre dans le landau. Et avec le pied, il berçait.
C : Voilà.
A : Oui, parce qu’on n’a que deux mains !
C : Donc les premiers mois, ils avaient perdu dix kilos. Chacun.
T : Chacun..
C : Et notre papa donc allait travailler en plus pour…
A : Bah oui !
C : … gagner des sous (11). Donc du coup, c’était un petit peu difficile.
V : C’était dur, oui.
A : Mais il avait ses filles !
T : Voilà. Oui, voilà !
V : Les trois, donc…
A : Bon et vous, alors, est-ce que vous vous verriez avec…
T : Non !
A : D’abord une famille nombreuse ou pas ?
T : Oui, oui.
V : Moi, j’en veux deux, même trois peut-être. Mais pas des triplés ni des jumeaux. J’en veux… Un par un.
C : Alors, oui, on veut pas de triplés et pas de jumeaux, toutes les trois parce que, je sais pas… On sait ce que c’est, alors peut-être que…
V : Peut-être qu’on veut savoir ce que c’est maintenant que d’être chacun…
A : Chacun son tour ?
T : Voilà. Voilà.
A : Oui, oui.
S : Ça ferait trop ! (12)
A : Mais bon, après tout, on choisit pas  forcément, hein !
V : Ah oui, non. Viendra ce qui viendra mais…
C : Mais on dit que ça saute une génération. Donc ça sera nos enfants.
A : C’est vrai ? Il y en avait dans la famille avant ?
T : On est une famille à jumeaux.
S : On est beaucoup, beaucoup de jumeaux. Donc…
C : Bon là, maman,trois… C’est le record !
A : Mais bon, du coup, c’est ça, vous êtes les trois filles. Il y a pas eu d’autre enfant après ?
T : Non. Non, non.
A : Ça suffisait !
T : Oui, voilà.
C : Ça suffisait. Ils ont pas tenté les garçons (13), comme certains disent ! Non !
A : Mais à combien de… Disons, à combien de mois on émerge un petit peu ? Parce que déjà, quand on en un, on se dit : Bon…
S : Je crois que…
A : Les nuits, les choses comme ça. Qu’est-ce qu’elle dit votre maman ?
V : Ce qui…ce qui était dur avec nous, c’est que dès qu’il y en a une qui se mettait à b[…] (14), à pleurer, parce qu’on avait une chambre pour trois, donc du coup, on réveillait systématiquement les deux autres. Donc les trois se mettaient à (15) pleurer. Il fallait plus en calmer qu’une, il fallait en calmer trois (16). Donc c’était assez dur. Puis bon…
A : Au niveau de la logistique !
T : Voilà.
S : Je crois qu’ils parlent en terme pas de mois, mais d’années.
A : D’accord. Bon et maintenant, ça va ?
T : Oui…
V : Maintenant, il y a de la main d’oeuvre (17) pour… le ménage, la cuisine.
A : Oui, oui. C’est bien, hein ! Bon bah, je vous remercie.
S : Merci à vous.
A : Et puis… bah, bonne continuation en trio et voilà.
T : Merci.
A : Merci beaucoup.

Des explications :
1. vous dites… : il manque « que » pour introduire la suite. Mais à l’oral, on a tendance à l’oublier.
2. Un boute-en-train : c’est quelqu’un qui est gai et drôle, qui met de l’ambiance.
3. Cadrer : donner un cadre à respecter, une structure, une discipline
4. c’est de cet ordre-là : c’est comme ça.
5. Super trop content : normalement, c’est soit l’un, soit l’autre : super content / trop content, qui signifient très content, dans un style familier. Normalement, trop exprime un excès: je suis trop fatigué / Tu parles trop / Tu parles trop vite. Mais oralement, il est maintenant aussi utilisé comme synonyme de très, comme ici, sans doute pour accentuer davantage. Mais c’est familier.
6. En avoir marre de (quelque chose ou de quelqu’un) = en avoir assez (familier)
7. trois d’un coup : trois en une seule fois, en même temps.
8. Hormis ça : à part ça
9. c’est l’usine : cela signifie que c’est un travail intensif, sans arrêt, comme un travail à la chaîne.
10. Dans un bras : c’est un peu bizarre d’utiliser dans. C’est sans doute parce qu’on dit : dans les bras, avec bras au pluriel. Donc là, avec juste un bras, c’est maladroit. Il faudrait dire par exemple: il en tenait une d’un côté et la deuxième de l’autre côté.
11. Des sous : de l’argent (familier)
12. ça ferait trop = ce serait trop. Mais on utilise plus souvent le verbe faire : ça fait trop.
13. Tenter les garçons : essayer d’avoir des garçons.
14. Véronique allait dire : brailler, qui signifie pleurer très fort (ou crier très fort). Mais c’est péjoratif, donc elle se reprend et utilise le verbe pleurer.
15. se mettre à faire quelque chose : commencer à faire quelque chose
16. il fallait plus en calmer qu’une : il aurait mieux valu dire : Il ne fallait plus en calmer une seule mais trois / Il ne fallait plus en calmer seulement une mais trois. / Il n’y en avait plus seulement une à calmer mais trois. La phrase de Véronique signifie plutôt : il n’y avait plus qu’à en calmer une seule, ce qui est le contraire de sa pensée.
17. Il y a de la main d’oeuvre : il y a du monde pour travailler, aider, pour donner un coup de main.

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