La préférée du roi

La nouvelle année universitaire a commencé il y a quelques semaines. Et donc la nouvelle équipe est en place : Shainesse, Nawal et Christelle vont partager avec vous un peu de leur vie en France.

Aujourd’hui, c’est Shainesse qui nous parle d’elle.
Vous allez comprendre pourquoi elle a donné ce titre à ce nouveau billet !

Transcription:
S: Shainesse / A: Anne

A : Donc bonjour Shainesse .
S : Bonjour.
A : ça va bien?
S : Oui, ça va, et vous?
A : La semaine démarre bien?
S : Oui. Bah, c’est un… c’est un peu dur quand même, mais bon.
A : Oui ? beaucoup de boulot (1) ? Ça y est ?
S : Oui, ça y est, déjà!
A : D’accord. Donc en fait, bon, je vous connais pusique qu’on était ensemble en première année, mais je vous connais sans vous connaître. Alors je voulais savoir un petit peu… Bon, vous vous appelez Shainesse, et c’est… je me dis, bon, quelle est votre origine exactement? (2)
S : Bah, Shainesse, en fait, c’est un prénom d’origine perse qui veut dire la fille du… « la préférée du roi ».
A : C’est vrai ?
S : Oui. Enfin ma mère, elle le savait pas quand elle me l’a donné mais apparemment, c’est ce que ça veut dire.
A : Et pourquoi elle avait choisi alors ce prénom-là, perse ?
S : Parce qu’en fait… Je sais pas vraiment. En fait, elle l’a entendu dans la rue et elle a décidé de m’appeler comme ça.
A : Ah d’accord!
S : Et c’est peut-être aussi peut-être parce que ça a un petit peu une résonance arabe et en général, enfin dans mon pays, les.. tous les prénoms, ils sont… ils sont arabes en fait.
A : D’accord, parce que votre pays, c’est quoi? (3) C’est pas la France?
S : Non. En fait, mon pays d’origine, c’est les Comores. Donc voilà.
A : Alors les Comores, mais ça veut dire que vous y avez… vous y êtes née, vous y avez grandi ?
S : Bah oui, en fait, j’ai grandi aux Comores, enfin… En fait, les Comores c’est un archipel d’îles (4) et j’ai grandi en Grande Comore donc et je suis arrivée en France à l’âge de 14 ans pour poursuivre mes études (5).
A : D’accord. Mais avec la famille ou toute seule?
S : Mon père, il habitait déjà en France donc j’ai… je l’ai rejoint, et ma sœur aussi, elle y habitait déjà avec mon père. Donc du coup, je les ai rejoints tous les deux.
A : Et votre maman, elle est aux Comores?
S : Oui, ma maman, elle est… Elle vit toujours aux Comores.
A : D’accord. Donc quand vous êtes partie à 14 ans, ça a fait quand même… Enfin, ça devait être une grosse, enfin un gros changement?
S : Oui, c’était vraiment un gros changement mais en fait, je pense ce qui m’a amorti (6), c’est la présence de mes parents, enfin la présence de ma sœur et de mon père.
A : … qui étaient déjà bien intégrés, bien habitués. Mais c’était à Marseille? Ils étaient installés à Marseille ?
S : Oui, je suis arrivée directement à Marseille.
A : D’accord. Et comment vous l’avez vécu ça, alors quand même? Parce que vous dites que ça a un peu amorti le choc et tout. C’était dur quand même?
S : Oui, c’était quand même assez dur parce que en fait, c’est… Rien qu’au niveau du temps (7),
A : Le climat, tout ça ?
S : Le climat, c’est pas du tout le même. Par exemple, d’arriver en France en été alors que moi, je viens d’un pays où il y a pas… enfin il y a pas vraiment de saisons en fait. Donc en général, le lever de soleil, c’est toujours vers 5 heures du matin et le coucher, il est toujours vers 18 heures. Et là en fait, le soleil, il se couchait pas. Donc à 18 heures, de voir toujours le soleil, ça me… ça me perturbait un peu en fait. Et c’est vrai que quand mon père, il disait : Bon, bah il est 21 heures, il faut dormir, et que moi, je voyais que…
A : Il faisait jour.
S : il faisait encore jour (8), je me disais: Bon, bah comment ça va se passer ?
A : D’accord, donc des petites choses comme ça qui surprennent vraiment.
S : Et sinon, enfin les rues… En fait, j’ai pas été très surprise parce que la France, je la connais à travers la télévision, donc c’était juste voir ce que j’avais vu à la télé mais en réalité en fait. Donc je me suis vite habituée, je pense. Et voilà, donc je pense que la première… enfin je me suis intégrée par l’école en fait, vu que…
A : Oui. Vous êtes arrivée en quelle classe alors?
S : En seconde. (9) En seconde.
A : D’accord. Et c’était facile de s’intégrer, enfin au niveau du… par exemple des programmes (10), tout ça ? C’était… Vous vous êtes pas sentie à la traîne ou…? (11)
S : Non, pas du tout.
A : Non pas du tout ?
S : Parce qu’en fait, j’étais dans une école française aux Comores.
A : Et il y a des liens importants entre la France et les Comores.
S : Oui, et en fait le programme que j’ai suivi aux Comores, c’est exactement le même que ce qui… que ce que les … ici, ils avaient suivi. Tous mes profs, ils étaient… c’était des fonctionnaires (12) issus de l’enseignement français. Donc voilà. C’était pas… au niveau du programme, c’était pas…
A : Oui, pas dépaysant.
S : Pas dépaysant. (13)
A : Et en fait, vous avez toujours parlé français ?
S : Oui.
A : Ou on parle autre chose aux Comores?
S : On parle la langue comorienne du coup, qui est un mélange…
A : Vous parlez les deux?
S : Oui, en fait, je pense que j’ai appris à parler français à l’école Et à la maison, je parlais plus (14) comorien du coup, parce que je vis avec ma mère qui parle pas beaucoup français. Voilà.
A : Bon bah c’est intéressant tout ça, c’est une belle expérience.

Des explications :
1. le boulot : le travail ( style familier)
2. quelle est votre origine ? : on dit plus souvent : De quelle origine êtes-vous ?
3. Votre pays, c’est quoi ? : style uniquement oral. De façon plus neutre, on dit : De quel pays êtes-vous ? / Vous venez de quel pays ?
4. Un archipel : Shainesse l’emploie au féminin mais ce nom est bien masculin. Et il n’est pas nécessaire d’ajouter qu’il s’agit d’îles, puisque par définition, un archipel est toujours composé d’îles.
5. Poursuivre ses études : on peut dire aussi Continuer ses études. Il n’y a aucune différence.
6. Ce qui m’a amortie : ce n’est pas très correct car le verbe amortir s’emploie à propos de choses : amortir un choc, amortir un coup par exemple. Elle aurait pu dire : Ce qui a amorti le choc, le changement. (amortir = atténuer, diminuer les effets de quelque chose pour que ça se fasse plus en douceur.)
7. rien qu’au niveau de… = si on considère uniquement… (syle familier)
8. faire jour / faire nuit / faire noir : en français, on utilise le verbe faire, pas le verbe être dans ces expressions.
9. La seconde est la première année au lycée. (On entre au lycée après le collège, qui compte 4 niveaux).
10. Le programme : dans le contexte des études, c’est la liste des connaissances et des compétences qu’on doit acquérir année après année. Les professeurs doivent suivre le programme, faire le programme. On dit aussi que telle ou telle connaissance est au programme de la seconde par exemple.
11. Être à la traîne : être en retard, avoir des difficultés à suivre. Donc se sentir à la traîne, c’est se rendre compte qu’on ne maîtrise pas bien certaines choses.
12. Un fonctionnaire : un employé de l’Etat.
13. Dépaysant : qui change de nos habitudes.
14. Plus = davantage (On prononce le « S » à la fin quand il a cette signification.)

Les Comores : ces îles se situent dans l’Océan Indien, entre les côtes africaines et Madagascar. L’une d’elle, Mayotte, est restée française. Les autres sont devenues indépendantes en 1975.

Pour télécharger: La préférée du roi – France Bienvenue

(L’enregistrement mp3 est un peu plus long. Voici la fin.)
S : Oui, c’est vrai que avec… enfin quand on prend du recul sur sa vie, on se dit, oui, c’est vrai, c’est pas la vie de n’importe qui, quoi. C’est…
A : Oui, c’est sûr. Merci beaucoup.
S : De rien.

13 réflexions sur “La préférée du roi

  1. Phan dit :

    Bonjour Anne,

    Je suis étrangère.  » Je vous connais sans vous connaître » a l’air … bizarre, pour moi 🙂 Je crois que je comprends ce que vous voulez dire. Mais est-ce qu’il y a d’autre façon d’exprimer cette idée avec 2 verbes différents?

    Je vous remerci d’avance.

    J’aime

    • France Bienvenue dit :

      Bonjour Phan, je voulais dire que je connaissais un peu Shainesse puisque je la voyais en classe. Mais en même temps, je sais peu de choses d’elle dans le fond. Donc j’aurais pu dire quelque chose comme : Je vous connais mais pas très bien. / Je vous connais mais je ne sais pas grand-chose de vous.
      A bientôt.

      J’aime

      • Phan dit :

        Oui, comme je l’ai deviné. Je trouve que c’est intéressant. Dans ma langue vietnamienne, pour une telle situation, il y a 2 verbes différents–mais en même temps, pas trop différents. L’un est « quen » et l’autre, « quen quen ». Et s’il y a le double dans le deuxième mot, c’est pour exprimer le doute, comme si on tentais de dire  » um, um, vous êtes… um » . Donc, je crois que vous pouvez deviner à votre tour quel mot correspondant à « vous connais » et quel mot à « sans vous connaître ». Et même, vous pouvez exprimer cette idée en vietnamien :D. Vous voulez essayer? en sachant que je –> tôi, vous–>bạn. Bonne chance à vous 😀

        J’aime

  2. adel dit :

    Bonjour,

    Je vous félicite pour votre travail, c’est excellent comme méthode d’apprendre français et surtout le dialogue écrit avec des explication.

    Merci

    J’aime

Laisser un commentaire

Entrez vos coordonnées ci-dessous ou cliquez sur une icône pour vous connecter:

Logo WordPress.com

Vous commentez à l’aide de votre compte WordPress.com. Déconnexion /  Changer )

Photo Facebook

Vous commentez à l’aide de votre compte Facebook. Déconnexion /  Changer )

Connexion à %s