Voici, in extremis, la conversation de la semaine. En fait, je crois que que je ne vais pas m’imposer la contrainte d’un jour précis, d’un jour fixe de publication, parce que, après tout, l’avantage de la retraite, c’est de ne plus avoir toutes ces obligations créées par la vie professionnelle. Alors autant en profiter ! Donc ce sera bien une fois par semaine, mais à géométrie variable dans la semaine, entre le lundi et le dimanche.
A propos de retraite, est-ce que vous savez quelle est la question que les gens vous posent au moment où vous partez en retraite, un peu avant, juste après. C’est une question qui revient souvent. La voici : Qu’est-ce que tu vas faire ? Qu’est-ce que tu as prévu ? Comment tu vas désormais occuper ton temps ? Et on a l’impression qu’il faut absolument trouver quelque chose à dire, avoir organisé plein de choses, avoir prévu plein d’activités, etc.
Alors aujourd’hui, vous allez entendre Jean-Claude nous raconter ce que lui avait décidé, mais à très court terme, puisque ça concerne les tout premiers jours de sa retraite. Il nous raconte, dans la conversation d’aujourd’hui, ce qu’il a fait le premier jour officiel de sa retraite et pendant les jours qui ont suivi.

Transcription
A : Alors, on va parler aujourd’hui d’un trajet que tu as fait il y a un an et demi à peu près.
JC : Bah oui, c’était pour ma retraite (1). Le premier jour de la retraite, je suis parti à pied, donc de ma maison où je passais… Depuis plusieurs années, je travaillais à Marseille et j’ai rejoint ma… à pied, ma maison, on va dire, qui était ma maison secondaire (2), voilà, et qui est devenue ma maison principale depuis, évidemment.
A : Ce qui veut dire combien de kilomètres, alors ?
JC : Oh, j’ai fait à peu près… aux environs, parce que j’ai pas refait le détail sur la carte, mais j’ai fait à peu près 400 kilomètres, oui.
A : Donc 400 km à pied, tout à pied !
JC : Oui, tout à pied, avec mon sac à dos, ma tente et, bon, une paire de chaussures évidemment, très important dans ce cas-là !
A : Oui. Elles ont tenu jusqu’au bout ?
JC : Oui, mais elles étaient pas neuves au départ et elles sont arrivées, on va dire, très fatiguées quand même (3) ! Depuis, elles me servent juste à aller dans le jardin, parce qu’elles étaient très usées.
A : Bon et alors, dans ce sac, qu’est-ce qu’il y avait ? Il pesait combien, d’abord (4) ?
JC : Je l’avais pas pesé mais il pesait autour de 12-13 kilos à priori (5), hein, quelque chose comme ça.
A : C’est quand même un peu lourd !
JC : Oui, c’est… C’est encore (6) confortable, mais il faut peut-être pas aller beaucoup au-delà (7), quoi, parce que après, ça devient en effet pénible sur les épaules.
A : C’est plus dur au début ou est-ce… Est-ce qu’on s’habitue ou est-ce que au contraire, à des moments, ça devient… On trouve que c’est très lourd et on aimerait bien s’en débarrasser ?
JC : Non, c’est le… C’est, franchement, c’est de plus en plus facile. Les premières étapes, j’avais été un petit peu prudent, j’avais calé (8) des étapes sur… de trente kilomètres, en me disant : plus (9), ce sera difficile. Et après je me suis rendu compte que, au fur et à mesure, bon bah on peut faire beaucoup plus, il y a pas de souci, quoi, bon enfin à condition d’être en bonne santé quand même évidemment au départ.
A : Oui, parce que 30 km, quand même, ça fait déjà (10) ! Ça faisait combien de… d’heures de marche par jour ?
JC : Bah moi, je fais… C’était ma fameuse opération : 4 x 8 = 32 (11), donc quatre km / heure, on calcule (12). Bon en réalité, on marche un petit peu plus vite, mais comme on fait des pauses, des choses comme ça, eh bah huit heures de marche.
A : Tous les jours.
JC : oui, tous les jours, pendant treize jours.
A : Et alors donc, pour en revenir à ton sac, qu’est-ce que tu avais décidé d’emporter ?
JC : Oui, bah j’avais pris quand même, enfin, le minimum, mais malgré ça, il s’est avéré (13) que j’avais pris un peu trop, parce qu’il y a des choses que je n’ai pas mises, notamment une grosse veste, quoi, parce que c’était en septembre, donc on a un petit peu peur du froid, de la pluie, tout ça. Mais donc j’avais ma tente, mon duvet (14), un petit tapis de sol. J’avais rien pris pour faire à manger, pour chauffer, hein tout ça, pour réchauffer, j’avais aucun appareil de cuisine, enfin, une petite cuillère et un couteau. Et puis après, des habits, des habits de pluie – un K-Way (15), une cape – deux ou trois sweats. J’avais fini par prendre, un petit peu à regret (16), ma grosse veste. Je l’ai jamais mise à vrai dire (17) ! Et pourtant, c’est ce qui pesait le plus. Voilà. Puis après évidemment, du petit linge de rechange (18), quoi.
A : Mais par exemple, les vêtements, ça veut dire… Combien de T-shirts, combien de shorts ? Et comment tu te débrouillais ?
JC : Moi, c’était… J’avais pris trois slips, trois chaussettes et trois T-shirts.
A : Trois paires de chaussettes.
JC : Oui, trois paires de chaussettes, oui, pas trois chaussettes, c’est vrai ! Et je lavais le soir, voilà, tous les soirs, je lavais. Et alors les jours où il faisait beau, où il a fait beau, bah ça a séché dans la nuit. Et puis je finissais, de toute façon, le séchage sur mon sac à dos.
A : Bon et alors donc la tente, elle t’a servi à chaque fois ou tu as dormi dans d’autres lieux ?
JC : Oui, j’ai aussi dormi dans d’autres lieux. J’ai dormi dans des terrains de camping. J’ai pris une nuit à l’hôtel… non, deux nuits à l’hôtel en fait, voilà..
A : Mais tu avais pas réservé ?
JC : Non, non, sans réserver.
A : C’est au hasard (19) des étapes.
JC : Au hasard, oui. Et notamment arrivé à Millau, bon, une demi-heure avant l’arrivée, j’ai pris un orage terrible, mais vraiment terrible ! Donc j’étais complètement trempé malgré ma cape. J’avais mis le K-way, la cape par desssus. Mais l’orage, il était vraiment énorme. Sur le chemin, c’était devenu presque une cascade. Donc j’étais trempé vraiment de partout. Et j’avais prévu d’aller au camping, puisque j’ai fait du camping sauvage (20) ou du camping. Mais là, à Millau, j’avais prévu d’aller au camping. Et puis finalement, je me suis dit : « Non mais ça va jamais sécher. Tu vas… » enfin, voilà, et donc j’ai fini à l’hôtel à Millau.
A : Histoire de (21) se remettre un peu… de remettre les compteurs à zéro (22), avant de repartir !
JC : Les compteurs, le moral (23), de tout sécher, de repartir, voilà.
A : Oui, oui. Et donc en fait, c’est pas un sentier… enfin, c’est pas un itinéraire balisé (24) comme, je sais pas, le chemin de Saint Jacques de Compostelle, des choses comme ça. Donc c’est toi qui as fait tes étapes et qui a préparé tes chemins. Tu as cherché sur une carte, sur les sentiers de randonnée, tout ça, et tu as combiné tout ça ?
JC : J’ai combiné mais c’est quand même des… C’est essentiellement des morceaux de GR, on va dire, de chemins de grande randonnée, avec des petits chemins, des fois quelques routes, mais même les GR empruntent des petites routes, donc pour essayer de passer d’un GR à l’autre parce que évidemment, cet itinéraire-là est pas… Bon et après, j’ai décidé par exemple de passer au Mont Aigoual, c’était pas obligé, j’avais plusieurs options. Et donc je me suis fait mon chemin, oui, avec des cartes, oui, donc voilà.
A : Tu as toujours pu passer partout où tu voulais ou est-ce que par endroit, c’est bouché (25) ?
JC : Bah oui, mais quand même, il y a des endroits où il y a des obstacles, des chemins qui, sur les cartes, existent et qui n’existent plus, qui sont barrés par, on va dire, la végétation, des choses comme ça. Donc je me suis fait des tracés au milieu de la végétation, des fois très difficiles, mais pas longs, hein, jamais longs ! Bon, quelques erreurs de ma part, donc j’ai eu quelques, on va dire, grillages à escalader plusieurs fois pour passer, ou alors, il fallait que je fasse des demi-tours mais j’ai jugé que ça allait être très long et j’ai préféré escalader des grillages. Et aussi à un endroit, bon, une… Quelqu’un qui a, bon, qui a la maison à côté qui ne souhaitait pas que les gens passent sur le chemin qui existe réellement et donc qui a tout coupé, bon, qui avait un gros chien, enfin bon, des… Mais ce sont des péripéties, quoi voilà, des petites péripéties, comme le mauvais temps d’ailleurs, bon puisque, globalement (26), ça c’est très bien passé (27), c’était très facile, avec, bah de temps en temps, j’ai fait des allers-retours, voilà, quelques petits incidents – j’ai perdu mon portefeuille, je l’ai retrouvé, enfin quelqu’un me l’a retrouvé – enfin… etc., voilà quoi !
Des explications
- ma retraite : la période de la vie où on cesse de travailler, au terme de sa carrière professionnelle
- une maison secondaire : terme utilisé pour désigner une maison qu’on a en plus de sa résidence principale et où on passe du temps pendant les weekends, les vacances. On dit aussi : une résidence secondaire
- quand même : malgré tout, cependant
- d’abord : premièrement, pour commencer
- a priori / à priori : sans trop entrer dans les détails, d’après une estimation de la situation
- encore : ici, cela signifie qu’un sac de ce poids reste confortable
- au-delà : plus loin qu’une limite donnée
- caler des étapes : prévoir, préparer des étapes
- plus = davantage (Il faut bien prononcer le « s » final)
- ça fait déjà = ça représente beaucoup / ça fait beaucoup (familier)
- 4 X 8 = 32 : c’est une des quatre opérations, quand on compte. On dit donc : quatre fois huit trente-deux. On peut dire aussi : quatre fois huit égal trente-deux
- on calcule = ici, cela signifie : on estime. Il s’agit de la vitesse moyenne à pied.
- il s’est avéré que… : on a pu constater / J’ai vu que…
- un duvet : un sac de couchage
- un K-Way : c’est au départ le nom de la marque française du célèbre coupe-vent, qui protège de la pluie. Mais c’est devenu un nom commun qu’on emploie à propos de ce type de vêtements très légers et peu encombrants qu’on met dans son sac à dos pour se protéger des intempéries.
- à regret : en n’étant pas sûr que ce soit une bonne idée
- à vrai dire : en vérité
- du petit linge de rechange : les vêtements et notamment les sous-vêtements qu’on change tous les jours
- au hasard des étapes : en fonction des étapes, sans avoir rien prévu
- faire du camping sauvage : dormir sous sa tente ailleurs que dans un terrain de camping. (dans un pré, dans la forêt, etc.) Sinon, on dit qu’on fait du camping quand on veut expliquer qu’on campe dans des endroits prévus pour ça.
- histoire de (+ verbe) : afin de / pour
- remettre les compteurs à zéro : recommencer du début, dans de bonnes conditions
- le moral : l’énergie mentale qui fait qu’on voit les choses avec optimisme. Après une étape difficile par exemple, on peut être démoralisé, découragé ! Une bonne nuit au sec peut donc redonner le moral.
- un sentier / chemin / itinéraire balisé : avec des indications de direction, des panneaux. C’est un chemin tracé, bien indiqué sur une carte et sur le terrain
- bouché : fermé, bloqué
- globalement : dans l’ensemble
- ça s’est bien passé : il n’y a pas eu de problèmes
A la semaine prochaine, pour la suite de cette conversation
Super intéressant, et un entretien détaillé, ce qui me plaît beaucoup. Merci!
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Bonjour Peta,
Merci pour votre message. Et merci d’être toujours là ! J’espère que vous continuerez à trouver votre bonheur ici maintenant que je reprends ce site toute seule après toutes ces années à le faire vivre avec mes étudiants.
A bientôt
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